ESSAIS SYMBOLIQUES
Titres des Essais: Variations sur le tronc de la Veuve, Variations sur l'Opacité, Variations sur le coq et la chouette, la lettre G, Essaimage et Fleur de l'âge, le Tire-Bouchon, QI maçonnique, l'Habitude écrit à la Tradition, Tais-toi et taille!, Gâteau d'apprenti, la Maçonnite, Sous le Pavé la Plage, Au clair de la Lune, Méthode ASSIMIL, Maçonnerie sans Cédille, Cours du Soir, Le Sage ne rit qu'en tremblant, Agapes, Rire et initiation
1- Le coq et la chouette
2- Et réciproquement… comme dirait Pierre Dac
3- Avant le chant du coq
1- Le coq et la chouette
Le coq chante et la chouette chuinte.
Coq se prononce de la même façon lu de gauche à droite et inversement.
Chouette, c’est déjà plus dur : Ettuoche !
Ceci pour un préliminaire qui n’a absolument rien à voir avec ce qui suit… Quoique…
Coq et chouette, symbole de la complémentarité par une contrepèterie simpliste ?!… Pas seulement ça !… On peut lire d’ailleurs « le coq est la chouette » relié par le verbe « être » ce qui en fait une symbiose du couple ; celui-ci assure un équilibre car, comme en mécanique, si l’un tire, l’autre est attiré tout en maintenant une résistance, si toutefois il y a une volonté de préserver l’équilibre. Il s’agit là d’une complémentarité comme d’un dualisme. Un couple n’est pas forcément «mâle» et « femelle » ! Mais peut-être nous faut-il le miroir des animaux pour alimenter notre réflexion, La Fontaine l’avait bien saisi tout comme les égyptiens dont le bestiaire est une base du langage.
Coq donc symbole masculin et chouette symbole féminin ? D’ailleurs une inversion des lettres initiales des deux mots font d’un « coq pour une chouette » un « choc pour une couette ». C’est dans cette dualité du choc du réveil annoncé par le coq et la nuit symbolisée par cette couette, pardon, cette chouette que se révèle la symbolique du « midi minuit » ; en ce sens, le coq se réveille aux rayons du soleil qu’il appelle et vénère alors que plus subtilement en demi-teinte, la chouette s’exprime dans ce qui marque la réflexion du soleil dans l’astre lunaire au sein de la pénombre qui l’enveloppe sans l’emprisonner ; mais ne nous y trompons pas : si on peut lire « le choc et la couette » comme résultante du « coq et de la chouette », il y a lieu , sans doute, de rechercher notre vitriol hors de la douce et rassurante couette, dans des forces différentes et multiples qui nous éprouvent. Ainsi, au fin fond d’une cellule, au fin fond de nous-mêmes, il nous restera l’espoir d’être, peut-être , libre…
Mais, que dire alors de la conjonction dite de coordination entre « le coq et la chouette » ? Sont-ils véritablement reliés ? Car si l’un travaille au soleil de midi et l’autre sous la lune étoilée, quand font-ils des bébés afin de répandre dans le monde les vérités qu’ils auraient acquises ?
C’est là que notre mystérieux mot du début intervient : ettuoche, inverse de chouette , mais aussi abréviation de « et tout tautologiquement une otarie cave hennissante et énervée » car à la recherche de la lumière elle ne trouve que « myste et mu » ; mais elle commence à se rendre compte que de tous temps, seuls les hommes ont tenté de s’élever cherchant l’inaccessible mais que par essence le haut absolu et le bas absolu n’existant pas ils sont relativement interchangeables ; la terre, (peut-être l’enfant de la chouette et du coq ?…), la terre est ronde comme un cycle d’alternance du jour et de la nuit dont nous attendons le moment favorable pour nous élever.
C’est ce que je n’ai pas fait .
2- La chouette et le coq
…Or il advint qu’un fils de la lumière fit le pari de s’acoquiner avec une fille de la lune.
Union contre nature.
Vit-on jamais volatile claironnant la charge du soleil se couler dans le rythme nycthéméral d’une discrète belle de nuit ? Difficile certes, mais pas inimaginable, ni complètement nouveau, si l’on veut bien se souvenir du coq à l’âne – du coq et de la cane-
Mais comment s’y prendre quand on est du jour ? Quand on est du jour, qu’elle est de la nuit.
Lafayette alla chercher conseil auprès de Chantecler, le vénérable coq, au zénith du clocher, où dame Aegolie, l’oiseau de Minerve, abrite ses songes diurnes.
Rupicola, le coq servant, bien connu de nos galères, en tablier pied de coq et toque coq de roche, était à la lucarne de sa loge. Il fut ainsi le témoin privilégié de cette union qui n’aurait jamais dû voir le jour.
D’ailleurs, elle eut lieu presque la nuit, tant il est vrai qu’aucun mystère ne supporte la pleine lumière.
Mais il était dit que ce jour là, le soleil avait rendez-vous avec la lune et le coq avec la chouette.
L’éclipse, moment fécond, née de la conjonction de l’intuition et de la réflexion, nous place aux frontières de l’intelligible, au bord du vertige de la rencontre avec l’inconnu, avec l’autre ; et donc, les coqs ont peur puisque les chouettes “effraient”. Et pourtant, mes frères et mes soeurs, chevêche n’est pas revêche ! Ce fut une brève rencontre …nycthémérale s’entend !
C’était un coq qui avait tellement chargé qu’il se dit : “chouette, une hulotte sans culotte !”
Que nenni, c’était Nyctalope, N.T.L. de son petit nom (le glossaire sera sur le plateau du secrétaire).
Couleur de lune, couleur de nuit. Un peu dans la lune, beaucoup de la lune, la paupière nictitante, mais l’oeil en delta rayonnant sous son masque, hulotte mais pas boulotte, polyglotte, rapace mais pas vorace, chouette quoi!
Dressé sur ses égos et, mollets de coq, la crête en bataille et le coeur en ripaille, l’oiseau de Mercure, pour montrer sa belle sagesse, ouvre large ses barbillons et laisse tomber son aile sur la donzelle.
Elle, de surprise, laisse tomber son “h” et devient couette, le coq s’en saisit et devient choc.
Ils sont enfin à couvert, l’inviolabilité de leur mystère est assurée. Puisqu’il est l’heure et qu’ils ont l’âge…
Mes frères aux mollets de coq, mes soeurs aux yeux de chouette, il ne s’agit pas pour eux d’être comme des coqs en pâte, ni de travailler là où la bonne femme vendit son coq. Ils protègent leurs travaux. Ne soyons pas rouges comme des coqs et ne craignons point de sa part un comportement de poule. Si elle est très chouette, pleine de sagesse et de bonne volonté, elle est aussi un peu coq et c’est en elle, qu’est la lumière avant qu’elle ne brille au dehors.
Allons, ne soyez pas comme les coqs de la paroisse ! de minuit à midi, peu d’occasions sont données à ces deux veilleurs. Gageons que de ce choc de la couette, de ce cri et chuintement, de cette rencontre, brève certes, mais fulgurante et même transcendantale, naîtra ce qui, au delà des apparences, ne connaît ni jour, ni nuit, réconcilie les contraires et la dualité.
Lafayette veut montrer son bel organe, il ouvre un large bec et chante: “Viens poupoule, viens poupoule, viens…” Hélas, l’éclipse est finie, Aegolie endormie, et quand le coq chante, la chouette se tait et la caravane passe. Et à la réflexion tant mieux, nous avons échappé au canari !
C’était une éclipse, pas une galère, une neuf à la coq, que dis-je, une coque de noix, sur laquelle nous avons embarqué de plein gré avec vous.
C’était une chimère, que dis-je, une coquecigrue.
Notre témoin le coq servant nous dit: “Gardez vos poules, je lâche mes coqs”. Mais celui qui a été aveuglé par l’amour voit aussi bien de jour que de nuit.
Rupicola comprit, mais un peu tard que le fruit de cette union mystique n’était autre que cette forme éblouissante et androgyne à l’oeil frontal d’émeraude, qui lui avait fait un petit signe complice lorsqu’il avait pénétré dans le temple.
Comprenne qui pourra… ou voudra !
3- Avant le chant du coq
Petit enfant, éduqué comme vous l’imaginez (et si vous ne l’imaginez pas, cela n’a pas d’importance), j’étais fasciné par l’imminence du chant du coq dans la suite des reniements de Saint Pierre.
Pauvre Saint Pierre ! que j’admirais pour son apparent courage n’avait-il pas voulu tirer Jésus Christ par la force, du traquenard du Mont des Oliviers ?- et dont j’avais choisi le prénom lors de ma Confirmation ! (on m’a fait la totale, les initiés de l’eau bénite comprendront…)
Ce reniement, qui ne lui avait pas été arraché sous la torture, ne témoigne, dans l’Évangile, que d’une défaillance passagère dont il n’est plus fait grief à l’intéressé du moment qu’il a su se racheter, contrairement à Judas.
Je reste fasciné par la capacité humaine à trahir : l’amitié, l’amour, la confiance d’autrui.
Je ne me mets pas hors du lot.
L’homme ne se définit que par ses actes, et il arrive des moments où l’on ne peut plus biaiser.
Il ne lui reste que le choix de céder à ses faiblesses ou à faire un pas en avant, dans le vide, pour les dépasser.
Si on n’a pas le choix, c’est triste, mais c’est une autre histoire qui n’appelle aucun cocorico.
Le reniement, c’est la lâcheté !
On pourra faire mieux un autre jour, mais ça reste une souillure qui ne partira pas au lavage…
Au lavage des larmes qui burinent, dans l’iconographie, le visage de Pierre… si l’on accepte de pleurer, ce qui n’est pas donné à tous les lâches.
Je n’oublie pas la maçonnerie (“Tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon obédience…”)
Nous le savons, c’est au pied du mur que le maçon se révèle.
Le mur, c’est l’occasion de voir s’il a compris quelque chose à l’ordre maçonnique ou s’il n’est qu’un cordon sur pied.
L’Ordre maçonnique, c’est tout, sauf l’ordre établi.
Dés que le maçon choisit l’ordre établi, comme saint Pierre, il renie l’esprit de l’ordre maçonnique.
C’est vrai qu’il est toujours plus difficile de penser par soi-même que de se conformer à la pensée des autres, surtout si elle est dominante.
Pourquoi, alors que l’esprit maçonnique est celui de la libération de la pensée, de l’expression du doute, de l’imagination, de l’humour, de l’engagement critique, tant de maçons privilégient-ils la rigidité mentale, le dogme, la langue de bois insupportable, l’onction des adjudants de ce qui n’est plus une loge, mais une caserne ?
Pourquoi, alors que la Vie -avec un grand V, pas la “vie du rail” n’est issue que du choc des tensions, de confrontations, de différences, certains maçons préfèrent-ils veulement, le pas lent du troupeau, l’aboiement du chien de berger, l’immolation de leurs entrailles à la pensée ésotérique unique ?
C’en devient obscène, je m’arrête.
Il y a plus que de la lâcheté, il y a du reniement fondamental à la dimension humaine que l’ordre maçonnique appelle à faire rayonner dès la cérémonie d’initiation, dans le fait de s’agenouiller, adulte-maçon, devant ce qui faisait tant de mal aux doigts et aux rotules de l’enfant-écolier-puni : La règle.
Je ne méconnais pas le caractère iconoclaste d’un tel raccourci qui tend à ranger les maçons en deux catégories : Les affranchis et les serfs.
Il n’est pas dit que, dans une vie maçonnique, on ne soit pas, un jour l’un, un jour l’autre…
Mais il est vrai qu’une personnalité non structurée, fragile, quémandant la reconnaissance des autres comme condition de son existence à ses propres yeux, habile à jouer de la tolérance culpabilisante des ses frères ou soeurs dans une structure intemporelle où ses névroses peuvent avancer masquées, fera du maçon un excellent gardien de la Règle, comme elle aurait généré, dans lé monde profane, un excellent gardien de prison.
La personnalité forte, curieuse, indépendante, en quête de liberté intérieure, n’a aucune chance sur l’échiquier des matons. Elle peut, néanmoins, s’épanouir en maçonnerie sur le pavé mosaïque des fous.
Être maçon sans se renier, parvenir à la connaissance sans être mutilé, comme la chouette livrée à l’ignorance des superstitieux, c’est le défi maçonnique.
Il faut le relever avant que le coq ne chante !