1896/1996
Centième anniversaire du blasphème de Clovis Hugues
Chronique d'un blasphème - Biographie du Frère Clovis - L'allocution - Revue de Presse - La chanson -
Organisé par le “Comité CLOVIS”, association Loi 1901
C.L.O.V.I.S. Comité Laïque d’Organisation pour les Valeurs Idéales et Sociales…
Pied de nez aux cérémonies officielles de la commémoration de la “naissance de la France”, le centième anniversaire du“blasphème” de Clovis Hugues fait écho au 1500ème anniversaire du “baptême de Clovis”
Pourquoi ce canular figure-t-il dans ce site d’humour maçonnique ?
– Parce qu’il a été monté par des maçons et des maçonnes et qu’il honore le Frère Clovis Hugues, reçu Franc-maçon à la Parfaite Union, à Marseille en 1876.
Le blasphème du Frère Clovis Hugues, inventé de toutes pièces , peut se résumer de la sorte :
En mai 1896, lors du Banquet d’Union de Saint-Mandé, Clovis Hugues, personnage haut en couleur, poète et révolutionnaire engagé dans le mouvement ouvrier et républicain depuis la Commune de Marseille en 1870, en réplique à l’intention de l’Église d’associer l’État aux cérémonies du 1400ème anniversaire du baptême de Clovis, a conçu l’organisation du célèbre autodafé des éteignoirs.
Ainsi, au mois de septembre 1896, on a élevé un peu partout en France des bûchers sur lesquels le peuple favorable à la séparation de l’Église et de l’État, a fait brûler des éteignoirs, objets symboliques de l’obscurantisme.
L’autodafé des éteignoirs étouffa les prétentions de l’Église qui tentera en vain d’oublier le ” Blasphème de Clovis Hugues “.
Cent années plus tard, La manifestation d’Aix en Provence qui vit “l’autodafé des éteignoirs” -symboles de l’obscurantisme- donna lieu à des échauffourées largement commentées dans la revue de presse.
Manifestation d’Aix en Provence
La date du samedi 14 septembre, veille de l’ASSOGORA (journée des Associations d’Aix en Provence), fut choisie pour appeler la population à célébrer le blasphème de notre Clovis par un rassemblement puis un défilé parti du Cours Mirabeau, jusqu’au Palais des Congrès, en passant par la rue Clovis Hugues.
Pourquoi Clovis Hugues ?
Son prénom fait le lien avec l’évènement à détourner… Clovis Hugues, poète, “félibre rouge”, homme politique, est représentatif des valeurs républicaines de liberté, de progrès social et de fraternité.
Le Maire qui avait été averti du projet en avait beaucoup ri malgré ses réserves à ne pas trop choquer la gente dévote. L’autorisation municipale fut accordée ainsi que l’utilisation du palais des Congrès de la rue Maréchal Joffre où furent prononcées de vibrantes allocutions.
Les samedis précédant la manif, des tracts furent distribués sur le marché tandis qu’on entonnait la “Chanson de Clovis”, dont les paroles inédites furent mises en musique par un frère musicien.
Un frère artiste imagina les fameux éteignoirs qui devraient être brûlés à l’issue du défilé et conçut la planche “fabrication des éteignoirs” dans le style ” encyclopédie de d’Alembert “. C’est lui également qui réalisa le portrait de Clovis Hugues qui figure dans ces pages ainsi que le magnifique portrait géant dont fut tapissée la porte monumentale du Palais des Congrès.
La couverture médiatique fut superbement assurée dans le Provençal par une journaliste, Colette Auger acquise à cette Célébration. Richard Martin et le théâtre Toursky de Marseille firent de la publicité dans leur bulletin et mirent à la disposition des “manifestants” une troupe d’artistes africains.
Internet n’existait pas encore. C’est le fax qui permit alors, essentiellement, de faire connaître le projet à la presse, à quelques personnalités laïques ou originales et à une centaine de présidents de loges maçonniques. Les organisateurs souhaitaient donner une dimension nationale au blasphème de Clovis Hugues comme ce fut le cas (du moins l’affirmaient-ils!) en 1896.
Quelques encouragements parvinrent au Comité C.L.O.V.I.S. créé pour l’occasion (Comité Laïque d’Organisation des Valeurs Idéales et Sociales). Des loges parisiennes furent tentées par la démarche, mais le temps manqua pour fournir aux intéressées une manif clé en mains. M. Michel Charras s’excusa de ne pouvoir se rendre à Aix ce jour là. Jean-Claude Izzo, auteur d’une biographie de Clovis Hugues, rencontré quelques jours auparavant à la journée des écrivains de Fuveau, promit de faire son possible pour rejoindre le Palais des Congrès. Yvan Audouard, écrivain et journaliste, publia sur l’action un élogieux article dans le Canard enchaîné . (Yvan Audouard, avec son sens de l’humour, avait flairé le canular. Mais on ne prête qu’aux riches ! Aussi écrivit-il : « j’allais sombrer dans la mélancolie lorsque j’ai appris que certains bons esprits (dont pourtant certains universitaires) ont décidé de célébrer la mémoire… le 14 septembre, dans le cadre de l’université d’Aix en Provence…»)
Le samedi 14 septembre dans l’après-midi, trois cent personnes environ (400 écrira la bonne presse) se rassemblèrent près de la statue du Roy René.
Des textes de la chanson de Clovis et des Chroniques d’un Blasphème furent distribués aux joyeux manifestants. Tout ce monde, encadré par quelques policiers municipaux, au rythme des percussions des musiciens du Toursky, prit la rue d’Italie en chantant et en brandissant les éteignoirs qui avaient été confectionnés.
C’est à mi-chemin de la rue Clovis Hugues que le joyeux cortège se heurta à une escouade de jeunes gens d’Action française.
Casqués, le visage caché, ces contre-manifestants qui barraient la rue mirent le feu à des bonnets phrygiens. Le service d’ordre intervint pour les disperser et une fonctionnaire de police fut légèrement blessée. La marche du Comité CLOVIS se poursuivit néanmoins jusqu’au Palais des Congrès où se tint le meeting.
A la tribune, accompagné d’un accordéoniste, un comédien du Toursky chanta le Temps des Cerises. Puis vint le tour des orateurs. Au moment où le dernier prit la parole, un policier annonça une alerte à la bombe, avec demande impérative d’évacuer les lieux. L’annonce était évidemment bidon ! La police souhaitait en réalité voir la réunion se terminer au plus tôt, avant la nuit, de peur que les assaillants d’Action française ne reviennent à la charge.
Rassemblés à nouveau sur les parvis du Palais, les “laïcards” (comme l’écrira le lendemain le Méridional) brûlèrent leurs éteignoirs dans le brasero qui avait été préparé à cet effet, et prirent l’apéritif républicain -vin rouge et rosé- sous l’oeil inquiet des services de sécurité.
Pour les protagonistes, la journée se termina dans la liesse autour d’un casse-croûte bien arrosé et de chaleureuses accolades renforcèrent les amitiés déjà bien scellées.
Qui aurait entendu parlé du centième anniversaire du ” Blasphème de Clovis Hugues” si des énergumènes d’Action française n’avaient agressé la “procession impie” ? C’est grâce à eux, en effet, que le lendemain dimanche la manifestation aixoise fit les titres du Provençal, du Méridional et de la Marseillaise. (revue de presse)
La “chronique d’un blasphème“ résume la carrière poétique et politique de ce communard hors du commun qui a inspiré ce canular. Cette chronique éclaire également une période mouvementée de notre Histoire.
L’amour du Peuple et de l’Humanité, c’est ce qu’exprime la poésie jaillie du cœur de Clovis Hugues.
Tiré des Annales Politiques et Littéraires