De : Les aventures tumultueuses du Grand Architecte de l’Univers
…et de quelques uns de ses complices
M.B. Or:. de Carca Février 96
Quand Max Scheler ou Rickert, si vous préférez,
dit que l’axiologie est le vecteur hypothético déductif des conséquences logiques des valeurs morales de ce monde,
Qu’en pensez-vous ?
Décor 1
Ce soir-là, c’est jour de fête.
Celle-là, les frangins l’attendaient depuis des lustres.
Cela faisait longtemps que La Fraternité des Amis de Longue Date ne s’en était pas mis un sous la dent.
Il est là, l’autre, planté en plein milieu du bastringue.
Il se tord les mains, tape un peu le sol du bout des pieds.
Le VM:. n’est pas tout à fait prêt. On le sent fébrile. N’y voit rien. Réclame de la lumière en fléchant un sourcil chargé de noirceur bubonique et cacochyme vers l’apprenti chargé de la symbolique des boutons.
Sur les colonnes on remarque des visages d’inconditionnels de l’absentéisme. Le caractère exceptionnel de ces soirées à suspense donne de l’appétit. D’un geste évoquant le vol lourd d’un corbeau sur la plaine, le chef en chaire fait signe de baisser la lumière.
Et c’est parti…
– Bonsoir Monsieur.
Veuillez prendre place sur le siège que l’on vous a fait installer entre les colonnes.
Bien vu. Le type ne sait pas où sont les colonnes. Une main hasardeuse tâtonne dans l’espace. Quant à la chaise en bois blanc de la salle humide, celle aux bougeons fragiles, elle est encore sous la main protectrice du couvreur. Les colonnes, la gestuelle répréhensible, vindicative et courroucée, demandent aux FF:. Maître de cérem et Expert d’accélérer le mouvement.
Il est assis.
Un lit de calme borde l’ambiance.
Au chevet d’une mort annoncée les Maçons, statues de silence gravées dans une semi-obscurité, lèchent dans leur tête de vieilles images cépia.
De nouveau l’impétrant impatient et inquiet baigne dans un océan d’incertitude. Il croise les pieds. Les décroise. Ne sait pas s’il a bien fait et hop les remet en situation. Croise les bras, les décroise. Se mouille les lèvres. Toussote. Tout ceci en essayant d’attirer le moins possible l’attention.
Ce type fait le beau. Cela se voit. Mais on le sait : il n’en mène pas large.
A la question du Véné, il répond « Bonsôôôôôir » Il a bredouillé. Tout le monde l’a entendu. Bon, il ne va pas être déçu du voyage. Ce mec va déguster à la petite cuillère. Certains ne sont pas venus les mains vides.
De petites questions de derrière les fagots attendent leur heure.
Décor 2
On commence, ça y est., c’est le signal
Les yeux sur les colcol:. brillent de plaisir
La salive folle coule sur les amygdales
Des rougeurs colorent les joues de plaisir.
La marmite d’onze heure bout sur le feu
Et ce soir d’élites, il y a pas mal d’envieux.
Rendez-vous de saison d’affamés du Bengale
Que la raison déjoue, que la chair fraîche emballe.
Le Vénérable, tel un chef d’orchestre, tend un doigt vers la col:. du Midi, c’est l’heure.
« Monsieur, dites-nous, s’il vous plaît, si vous considérez Dieu comme un aspect de la paranormalité occidentale ? »
Le profane rectifie sa position.
Il se tortille, déconfit, sur sa chaise
Il frétille comme un poisson assis sur un lit de braise
Il va chercher mal à l’aise, un peu loin sa respiration.
Réfléchit dans le vide. Les mots volatiles s’envolent.
On le sent pédaler, la chaîne a sauté comme qui rigole.
Les bras croisés, le sourcil relevé coiffant un œil coquin,
Le F:. dans le noir silence interroge son voisin.
Il lui répond favorablement par un pouce levé, mouille-bouche,
Appréciant cette magnifique fléchette qui vient de faire mouche.
Le vénérable d’un coup de menton questionne la Col:. du Nord.
Un maître lève le doigt.
« Monsieur, vous avez dit à l’un de nos enquêteurs que la politique c‘était, aujourd’hui, un pour tous, tous pourri.
Je suis personnellement élu. J’aimerais bien comprendre ce que vous entendez par là ? »
On secoue des mains, on s’esclaffe en silence.
Ne posez pas de questions auxquelles vous ne seriez pas capable de répondre
Avait dit le VM:. avant l’arrivée du prof
Après une bonne demi-heure d’émission à tout rompre
Les FF:. commencent à regarder leur montre
L’heure du repos est arrivée, de zapper.
Certains héros commencent à être fatigués
Même au pays du logos cela se comprend
La chair quitte les os, ne sont plus si pimpants
Ni, sans dénigrer, de toute première jeunesse
Et c’est vrai qu’un bandeau demande des prouesses.
Dernière épreuve, la circulation des boules :
« Profane ajourné à un an » déclare le Vénérable.
En général l’histoire s’arrête là.
Tout au moins pour les FF:.
Le prof lui, après avoir descendu l’escalier d’un pas hésitant,
Les mains à l’avant, se retrouve perdu tout à coup sur le trottoir
L’Expert vient de le pousser dehors fermement sans histoire.
En lui disant un expéditif : « On Vous tiendra au courant ».
En guise parfois d’adieu. « Merci d’être venu. »
Certains n’en connaîtront peut-être jamais plus.
Décor 3
Il pleut.
Il fait même un peu froid.
Froid dehors. Froid dedans.
Tard, mais pas trop tard.
Le profane regarda sa montre. Que faire à cette heure-ci ?
« Tiens – se dit-il- je pensais que cela avait duré plus longtemps ».
Les jambes en coton, il regagna sa voiture.
« Ces cons-là m’ont scié – souffla-t-il – De plus, j’ai été minable.
J’aurais mieux fait de regarder le match de foot à la télé.
Dieu paramachin, merde alors z’en ont des questions » .
Il s’installa au volant de son véhicule et instinctivement alluma la radio. Il avait pris une cassette de Beethoven pour se donner du cœur au ventre. C’est plutôt maintenant qu’il en avait besoin. Il pencha la tête à l’arrière et attendit un peu pour récupérer.
Il ne sait pas combien de temps il resta comme cela.
Il avait envie de ne rien faire.
Il se demandait encore ce qui avait bien pu lui tomber sur la cafetière.
Tout cela avait été si inattendu. Il aurait dû se renseigner.
« C’est vraiment trop con de se faire piéger comme ça. »
Puis Beethoven posa ses instruments.
La radio resta allumée, silencieuse, imbécile, muette.
Il allait démarrer quand tout à coup une lumière attira son attention .
Les types avaient terminé leur réunion. Un mouvement changeait de pièce.
La porte claqua et l’un d’eux partit en coup de vent.
Puis, plus rien.
Il prit peur puis pensa changer d’air de crainte d’être vu.
Un gros brouhaha parvenait à lui en vagues sonores.
« Et si j’allais jusque là » risqua-t-il.
Dedans, il entendit des bruits d’assiettes et de verres, des rires.
Il mit l’oreille au volet. Risqua un œil dans une fente.
Les FM\ étaient là.
Ils se tapaient sur les cuisses en se racontant la dernière minable de l’intello de service des « grosses tête ».
Le profane en pétard eut un éclair bleuissant dans le regard.
Un trait de lumière zébra le ciel de longs filaments violets.
Ses vêtements explosèrent comme dans un drame de Godard.
« Super-Truc » apparut bardé de ses muscles d’acier.
Il creva la nuit d’un cri-éclair strident de douleur.
L’enfant en lui crut mourir dans des larmes de pudeurs.
Le bâtiment vola en éclats, dans une grande pagaille :
Murs, meubles, personnages, tous unis dans un même balluchon ;
Une Diapédèse informe, éparpillée sans faire le détail.
« Super-Truc » alla chercher un peu plus loin sa respiration.
Il réfléchit, flottant dans un lointain vide volatile, ça allait mieux.
D’un clin d’œil, un subtil plus serein, il sourit aux cieux.
Il sortit des clefs d’une poche doublure de son blouson,
Sifflotant, il muta sa voiture en soucoupe volante.
Et s’en alla, d’un jet, du côté de la ceinture d’Orion
Là où au fond de sa tête, dans une galaxie lactescente,
Infusent doucement des requêtes de ressacs de vie tranquille
Que la bêtise qui hébète, jamais ne distille.
Dans le fond, il n’avait pas passé une si mauvaise soirée.
Dans le clapotement à tâtons d’un dernier éveil
Dans ses yeux féconds couleur d’indulgence,
Son âme argon flottait comme une aile glissant en silence.
SALOMON…
Il était vraiment temps de retourner au pays du sommeil.
Salut les initiés !